Aristocratie - remettre les mots à leur place
Récemment se déroulait une émission dont nous allons reparler car elle s'inscrit dans l'un des thèmes naturels de notre site : Prise Directe, sur une télévision française. Son thème : "Mariages princiers : quand la monarchie casse les codes". J'ai visionné avec intérêt cette émission, et la critique en sera effectuée ces jours-ci.
Interrogé comme invité, Stéphane Bern, - qui a défendu, ainsi que Thierry Ardisson avec pertinence et de manière convaincante l'idée monarchique tout au long de l'émission - a indiqué à juste titre au sujet d'Emmanuel-Philibert de Savoie : "c'est un prince, pas un aristocrate". Il a tout-à-fait raison, et c'est l'une des erreurs les plus communes de confondre deux mondes qui n'ont en principe, rien ou presque rien à voir l'un avec l'autre. Il y aurait beaucoup à dire là-dessus.
On associe presque toujours et à tort la notion de monarchie, à tout ce qui concerne l'aristocratie, terme qui a retrouvé depuis quelques années le sens qu'on lui donnait au temps de la Révolution et qu'il conservait depuis. On confond ou on mélange aussi allègrement diverses notions. Nous y reviendrons.
Un article du magazine français VSD, peu objectif et vraisemblablement sans autre but que salir les monarchies européennes, titrait au mois de Novembre dernier : Sexe, drogue argent... ils sont fous ces aristos. Aristocratie, la foire de trône... et autre remarques peu inspirées et certaines, même, scandaleusement fausses : "... en dehors des visites des maisons de retraite, l'emploi du temps de nos monarques est marqué du sceau de l'oisiveté, et celle-ci, comme chacun sait, est mère de tous les vices."
On voit bien dans ce langage emprunté la volonté de discréditer à tout prix les monarchies. Dans quel but ?
Sans parler du contenu, compilation de toutes les histoires connues de la presse spécialisée et relatives aux différentes familles royales d'Europe, mais présentées sous un jour volontairement scandaleux (par manque de fond justement ?), ce titre était une faute.
Associer en effet les familles des différentes aristocraties d'Europe, et surtout l'aristocratie française toujours visée en France par ces rapprochements avec un passé historique douloureux non refermé, avec les monarchies, est un contresens et la preuve que les auteurs de ce genre d'article n'ont jamais atteint leur sujet. Dans quel but alors tout ceci ? Remplissage d'article parce qu'on s'ennuie, titre racoleur fleurant le scandale pour attirer des lecteurs ?
Posons, ou reposons cette notion claire : en France du moins, ce qu'il est convenu (pas très à raison) d'appeler l'aristocratie pour désigner ce qu'on appelle aussi la noblesse, n'a rien à voir directement ou indirectement sinon par allusions vagues, avec l'Ancien-Régime français.
Qu'on n'associe plus, s'il en était, les turpitudes des familles royales à ces familles dont le grand nombre est digne et suit une existence réservée, discrète, dans des conditions souvent modestes et proches de son esprit traditionnel.
Qu'on ne plaque pas sur les familles royales, dont les membres se révèlent de plus en plus au fil du temps, ouverts sur les questions importantes, les qualités et les défauts de l'aristocratie en France. Si celle-ci est loin d'être homogène, elle ne peut être reliée aux monarchies actuellement existantes.
Non, l'idée de monarchie, spécialement en France, ne fait pas bon ménage avec l'allusion systématiquement faite aux descendants de l'aristocratie.
Il est pénible qu'on ne puisse évoquer la notion de monarchie - déjà assez embrouillée par les errements de certains royalistes [ lesquels eux-mêmes n'ont qu'une appartenance assez lointaine avec elle ], sans que l'allusion à l'aristocratie s'y mélange !
Plus que les monarchies d'Europe, ce sont les notions exactes que nous voulons avant tout ici, présenter de façon juste. Si l'on veut objectivement évoquer ces notions, beaucoup de remises en place sont nécessaires. Nous y reviendrons.